jeudi 27 février 2014

L'avenir du marché de la fenêtre s'éclaircit grâce à l'innovation

Les vitrages, un outil prioritaire de la performance énergétique (crédit : LG Concept)
Si le sujet de la performance énergétique fait la part belle à l'isolation et aux équipements peu énergivores, rares sont les professionnels qui évoquent spontanément les menuiseries. Pourtant, des fenêtres vieillissantes et mal adaptées peuvent ruiner un bilan énergétique aussi sûrement qu'une mauvaise isolation. Et de fait, le remplacement des vitrages est considéré comme prioritaire et systématique dans la rénovation énergétique des bâtiments. Comme la ventilation, un autre "oublié", le choix des vitrages est donc d'une importance cruciale pour réussir une stratégie efficace de performance énergétique et, à l'instar de l'isolation, il n'est pas toujours facile de se repérer dans ce catalogue de solutions. Panorama des enjeux de ce marché qui, grâce à RT 2012, se dynamise surtout grâce à l'innovation.

Selon l'ADEME, les déperditions de chaleur provoquées par les baies vitrées sont de l'ordre de 30% dans les bâtiments tertiaires et de 10 à 15% dans les logements, qui ont souvent de moins grandes huisseries. Elles sont donc loin d'être négligeables et font parties intégrantes des efforts de performance énergétique. Simple, double ou triple vitrage, le nombre de parois ne suffit pas à faire d'une fenêtre un outil efficace. Les menuiseries doivent également être étudiées afin de rompre les ponts thermiques et de supporter le poids du vitrage, tout en s'adaptant, de la manière la plus étanche possible, aux ouvertures. Afin d'offrir des repères aux professionnels et particuliers, un classement AEV (Air-Eau-Vent) a été mis en place pour évaluer la performance des fenêtres. Dans le cadre de la performance énergétique, elle se mesure sur une échelle de 1 à 4 (classement à l'air), la classe A4 étant la meilleure et la plus recommandée par l'ADEME.

Une diversité de solutions

Il faut bien constater que le marché a bien évolué depuis les premières considérations en termes d'efficacité énergétique. Le temps est loin des fenêtres à simple vitrage ! Les solutions innovantes se sont multipliées et on distingue aujourd'hui les doubles vitrages ordinaires des doubles vitrages renforcés (ou vitrage ITR). Ces derniers se distinguent par le fait que l'espace qui sépare les deux vitres participe à l'étanchéité et à l'isolation générale, soit grâce à un revêtement spécial posé à l'intérieur des parois, soit par l'injection d'un gaz (comme l'argon) qui ne conduit pas la chaleur. Depuis quelques années, de nouveaux modèles à triple vitrage sont apparus sur le marché, qui combinent parfois les deux technologies.

Cette diversité de matériaux permet de mettre en place des stratégies de performance énergétique particulièrement ingénieuses. Par exemple, il est recommandé de poser des triples vitrages sur les fenêtres exposées au Nord et à l'Est, notamment dans les régions froides et montagneuses, car l'isolation est meilleure. A l'inverse, on recommandera plutôt d'équiper les parties Sud et Ouest avec un double vitrage qui produira une chaleur naturelle grâce aux rayons du soleil. On pourra même encore ajuster en choisissant des fenêtres antiréfléchissantes (dans les régions les plus chaudes), ou encore des vitres chauffantes qui disposent d'un film transparent branché sur secteur, qui génère de la chaleur par rayonnement.

Ces efforts d'innovation, renforcés par le contexte réglementaire et la RT 2012, payent aujourd'hui. Un tiers des fenêtres vendues ont un coefficient d'isolation thermique (Uw) inférieur à 1,4 alors qu'en 2010, 50% d'entre elles se situaient entre 2 et 1,4. 53% des fenêtres étaient ainsi certifiées NF en 2012, et 30% étaient certifiées Acotherm ! Ces performances résultent de la stratégie économique mise en place par les fabricants pour dynamiser le marché. Ces derniers ont ainsi décidé de baser leur développement sur l'innovation et la qualité des produits, à l'image des deux Fiches de Déclaration Environnementale et Sanitaire (FDES) pour les vitrages isolants rédigées par AGC France, Saint-Gobain Glass et Interphane, qui permettent de mesurer les performances à long terme de ces produits. Plus que jamais les fabricants misent sur l'écologie et la performance énergétique pour promouvoir leurs produits.

Un marché au ralenti

En temps de crise, cette stratégie a toutefois ses limites. Comme le marché des isolants, le secteur des fenêtres a, à la fois, profité de la RT 2012 et subi les conséquences de la crise économique dans le bâtiment. L'Union des Fabricants de Menuiseries Extérieures (UFME) a publié fin 2013 une étude portant sur l'état du marché de la fenêtre en 2012. Avec une baisse de 4,8% par rapport à 2010, les résultats ne sont pas brillants et restent conformes aux difficultés du secteur de la construction (le constat est le même selon l'étude TBC : -3,2%), même s'ils sont en réalité plus contrastés. En effet, le volume "fourniture+pose" a augmenté de 0,8%, alors que les prix des matériaux ont diminué de 2,4% entre 2010 et 2012. La seule prestation, compte tenu des nouvelles exigences dues à la réglementation mais également au niveau de technologie des fournitures, a donc augmenté de 15% en deux ans !

De plus, le marché se décompose entre les différents matériaux utilisés pour les menuiseries. Dans ce domaine, la crise n'a semble-t-il pas modifié le paradigme où le PVC domine avec 62% des parts de marché, quand le bois en réalise 13% et l'aluminium se maintient également à 23%. Cette statistique entre un peu en contradiction avec la dynamique d'innovation affichée par le secteur, car elle montre que l'innovation porte plus sur les parois que sur les menuiseries. Selon le CSTB, ces dernières sont pourtant primordiales pour améliorer le rendement des fenêtres. De fait, toutes les sociétés du marché n'ont pas traversé la crise de manière sereine : par exemple, Huis Clos a été mis en liquidation judiciaire et Lapeyre a réduit le nombre de ses salariés de 10%, provoquant un conflit social au sein de la société.

L'innovation comme dynamique de marché ?

La France possède avec Saint-Gobain Glass un leader mondial, solide et dynamique. En 2011, la société a réalisé en France 279 millions d'euros de chiffre d'affaires (pour 915 salariés), et se place à l'international (avec 9 500 employés) comme le leader du verre feuilleté. Grâce à la publication des deux FDES (cf. ci-dessus), elle s'est ainsi positionnée comme l'un des premiers verriers capables d'analyser le cycle de vie de ses produits. La course à l'innovation est d'ailleurs loin d'être terminé dans le secteur : un consortium de PME irlandaises, allemandes et danoises vient d'annoncer la création d'un système de fenêtre intelligente. Cette dernière est équipée d'un clapet piloté par des sondes (via un système électronique et WiFi), qui permet de réguler la ventilation d'une pièce, y compris en cas de présence trop importante de CO2. Un outil formidable pour opérer la rénovation d'un bâtiment où il est parfois trop compliqué de créer un système de ventilation double flux !

En cette période de relance, le marché du vitrage tient donc sa dynamique plus de l'innovation que du contexte réglementaire pourtant favorable. Cependant, cette inflation d'idées peut également représenter une menace pour le secteur. Pour le CSTB, notre garde-fou français de l'innovation, des innovations comme le triple vitrage n'entraîne pas forcément un progrès radical des performances en comparaison d'un double vitrage renforcé. Alors ? Le triple vitrage comme exemple du syndrome marketing à l'image de la multiplication des lames sur les rasoirs mécaniques ?

Toutefois, la formation des artisans et la mise en place de l'écoconditionnalité sont des atouts primordiaux pour faire de la fenêtre un outil efficace de la performance énergétique des bâtiments. Mais également de l'isolation acoustique... Et là, ce chantier est moins médiatisé.

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