lundi 6 mars 2017

Immobilier et BTP au cœur de la présidentielle (nan, on blague !)

François Hollande, contemplant le désastre dans le secteur du BTP (source : La nouvelle république)

[MESSAGE DE SERVICE : absent de ce blog et sur Twitter depuis un peu moins de deux ans, pour raisons professionnelles, je reprends au fil de l’eau mes analyses. Beaucoup de choses ont changé entre temps, dans le secteur, sauf une : le site de la Fédération Française du Bâtiment, toujours aussi vieillot et has been. Un signe, non ?]

Est-il permis de dire que le secteur de la construction a été le plus maltraité durant ce quinquennat ? Au fond du trou depuis 2012, date de l’arrivée de François Hollande à l’Elysée, le BTP remonte lentement la pente et semble voir le bout du tunnel. Mais les dégâts sont importants : destruction d’emplois, faillites d’entreprises et autres paradoxes non résolus à l’image des travailleurs détachés.

Les principaux candidats à la présidentielle devraient en faire un enjeu national, un combat de tous les instants… Qu’en est-il ? La comparaison avec l’agriculture, secteur bien moins important que la construction, est cruelle. Les professionnels et organisations syndicales ont su créer un évènement annuel où les responsables politiques se pressent. Un salon de l’agriculture, à la fois créateur de liens avec la population, d’influence, de notoriété. Quant à Batimat… A deux mois de la présidentielle, état des lieux sur un secteur crucial de l’économie française. 

Trois ministres ! 

Quel secteur peut s’enorgueillir d’avoir eu trois ministres en cinq ans ? Quel autre maroquin d’importance a-t-il été détenu par des personnes nommées là au gré de l’agenda politique ?
  • Cécile Duflot d’abord, de 2012 à 2014, estampillée EELV : nommée suite à l’alliance PS-EELV pour les élections législatives et présidentielles.
  • Sylvia Pinel ensuite, de 2014 à 2016, du Parti radical de gauche : nommée afin de resserrer la majorité présidentielle (sous-entendu le PS et les Radicaux) lors de la nomination de Manuel Valls comme premier ministre. EELV avait alors claqué la porte du gouvernement.
  • Emmanuelle Cosse pour finir, depuis février 2016, transfuge d’EELV et dorénavant membre du fantomatique Parti écologiste. A l’époque, François Hollande se voyait encore candidat possible et se devait de créer un noyau dur d’alliés (plus ou moins sincères).
Alors que la construction aurait pu être une locomotive économique de ce quinquennat, le secteur n’a finalement été qu’un boulet trainé sur presque la totalité des cinq années. La nomination de Cécile Duflot aurait dû s’accompagner d’une politique de relance avec, évidemment, des garde-fous. Les deux années ont finalement été un cauchemar, une véritable saignée comme le secteur avait rarement vu. La faute à Duflot ? En étant ministre, la responsabilité lui en incombe.

Puis arrive Sylvia Pinel, un peu par hasard, chargée des applications ET des dérogations des lois précédemment votées, notamment la loi ALUR. Auparavant au ministère de l’Artisanat, du Commerce et du Tourisme, elle n’a pas laissé un souvenir impérissable. Nombreux s’interrogeaient, à l’époque, sur sa montée en grade au sein d’un ministère de plein exercice sur un enjeu économique et politique essentiel. Le bilan ? Plat.

Quant à Emmanuelle Cosse, nommée en février 2016 dans un imbroglio politique que seul EELV peut connaître, elle comprend rapidement le peu de marge de manœuvre qu’elle a, à l’image d’un gouvernement et d’un président en fin de cycle. Et ce, une grosse année avant la campagne présidentielle. Il y a des signes qui ne trompent pas.

Comment, dès lors, ne pas y voir une forme (au choix) de condescendance, d’incompétence, d’ignorance, de la part de François Hollande, pour un secteur aussi stratégique ? 

Des chiffres qui font mal mais l’espoir revient 

Après avoir touché le fond en 2014-2015, le climat des affaires remonte graduellement depuis l’automne 2015. L’indicateur de février 2017 revient tout juste au niveau de celui de… printemps 2012. Idem pour le taux d’utilisation des capacités de production. Autant dire que cela reste faible.

L’année 2016 marque néanmoins une année de croissance et 2017 est plein d’espoir. Il faut voir la tendance et non pas se focaliser sur les chiffres bruts. Le redémarrage de l’activité est confirmé et l’emploi s’est stabilisé en fin d’année dernière. Certes, après 20 trimestres de baisse consécutifs. Un gouffre !

Le marasme est tel que certains parlent même d’euphorie sur le marché de la construction. Mais là encore, on peut voir le verre à moitié plein ou à moitié vide. « Pour la Fédération des promoteurs, la forte croissance du marché constatée depuis deux ans résulte aussi d’un effet de rattrapage des mauvaises années que furent 2013 et 2014 (moins de 100 000 ventes au global). Elle estime également que les 148 618 ventes de l’an dernier ne couvrent pas des besoins estimés à 200 000 logements issus de la promotion privée ».

Toutefois, le pire reste le flou persistant. La lecture attentive des indices concernant les opinions des entrepreneurs ne trompe pas. Au fil des mois, cela change du tout au tout. Une hausse suit une baisse plus ou moins importante, etc. Et tout le monde sait qu’un manque de confiance n’incite pas aux investissements.

Heureusement, l’élection présidentielle et l’intérêt des différents candidats, pour un secteur stratégique pour l’économie française et le bien-être de la population, devraient permettre de clarifier certaines choses. Bref, donner des axes et une vision claire à un secteur en manque de repères. 

Le débat politique ? Quel débat politique ? 

La médiocrité du débat politique, marqué par les petites phrases et la rocambolesque affaire Fillon, fait de nombreuses victimes, notamment le secteur de la construction. Pourtant, les sujets de discussions, de réflexions et de propositions ne manquent pas : du système bureaucratique d’instruction des permis de construire/rénover, en passant par les normes, les tactiques de rétention foncière des uns et des autres, la problématique des moyens de financement des ménages, la fiscalité, le travail au noir, les travailleurs détachés, les technologies au service du BTP, la thématique du développement durable…

La construction est au cœur de notre futur. Et pourtant ! Pour reprendre les propos de Catherine Sabbah, « autant de sujets à soumettre aux candidats à l’élection présidentielle qui, pour l’instant, semblent se soucier comme d’une guigne du logement des Français ».

Pourtant, la FFB avait posé les jalons de la discussion, dès septembre 2016, en publiant « Reconstruire la France ». Rapport-bilan du quinquennat qui s’achève, la publication visait surtout à « s’impliquer le plus en amont possible dans les débats électoraux de l’élection présidentielle 2017 ». Qu’en est-il ? Dans le débat public, les média ? Rien. Reste à se plonger dans les programmes des candidats.

Ceux-ci restent d’une grande généralité/banalité, focalisé sur le logement, avec une éternelle rengaine d’arguments idéologiques, sans articulations opérationnelles. Il ne semble pas y avoir de réflexion transversale sur ce qu’est le secteur de la construction dans son ensemble, ni comment relever les défis de ce secteur au regard de ceux du pays. Par exemple, en termes de développement durable ou sur la question de la digitalisation de l’économie (sans parler de l'emploi ou de la formation des salariés).

Le logement reste un produit d’appel, d’un point de vue électoral, où chaque candidat va enrober d’arguties les mots-clés que son électorat veut entendre : fiscalité, logement social, propriété, décentralisation, exclusion…
Au regard de cette vacuité, les professionnels du secteur en sont réduits à attendre la fin de l’été pour savoir à quoi s’en tenir. Six mois, ça va être long.


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